Sylvain Bloquet
Héritiers d'une tradition juridique issue du XVIIIe siècle, les premiers commentateurs du code civil perpétuent une conception doctrinale de la loi et des procédés interprétatifs communément partagés sous l'Ancien Régime. Leur conservatisme s'observe, autant à l'École qu'au Palais, dans une interprétation fondée sur les anciennes règles coutumières ou romaines, ainsi que sur les oeuvres des auteurs de l'Ancien droit, voire sur les principes du droit naturel. Cette doctrine de transition a vocation à s'effacer progressivement à partir du second tiers du XIXe siècle, lorsque se dessine une nouvelle conception de la loi, illustrée par la multiplication des références au droit public et au principe représentatif. Cette mutation de la loi se conjugue avec le renouvellement des instruments d'interprétation, tels qu'une meilleure diffusion des travaux préparatoires du code civil et le développement des recueils de jurisprudence. Ces instruments servent alors de support à une doctrine positiviste en plein essor, dont l'objet est autant d'infléchir la science juridique vers une forme d'exclusivisme légal, que de rénover les procédés méthodologiques par une lecture libérale de la législation civile.