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« Je n’en ai pas connu un qui eût pensé, l’année dernière, que la Finlande et la Norvège prendraient une telle importance dans la marche de nos destins », écrit l’essayiste et journaliste Emmanuel Berl (1892-1976) à la toute fin de la drôle de guerre. Au cours de ces huit mois d’attente (septembre 1939-mai 1940), les belligérants sont restés l’arme au pied, et c’est dans ce singulier contexte militaire que les intellectuels français se sont efforcés de penser l’époque vécue. Il en a résulté une cosmogonie des temps de guerre, dans laquelle les référentiels se sont mis tant bien que mal en place : l’Allemagne y figure comme l’ennemi absolu, le Royaume-Uni, l’Allié – avec majuscule – en une répétition apparente du premier conflit mondial. Un troisième groupe référentiel en montre cependant toute la différence : les neutres. Sous ce vocable univoque résident aussi bien des pays dont on souhaite ardemment l’entrée en guerre (les États-Unis), que d’autres dont on redoute au contraire l’intervention militaire (l’Italie fasciste de Mussolini). D’autres neutres, enfin, figurent le possible champ de bataille européen. Au premier rang desquels, les trois États du futur Benelux – Belgique, Pays-Bas et Luxembourg –, mais également ceux des Balkans ou encore les pays scandinaves. Par cette dernière expression, on peut entendre l’ensemble géographique rassemblant le Danemark, la Finlande, la Norvège et la Suède – dont les drapeaux rappellent la communauté de destin et de culture. Ce sont ces derniers qui reviennent plus particulièrement sous la plume des intellectuels français de 1939-1940 en plusieurs occasions spécifiques, et qui nourrissent par la même occasion le débat d’idées de la drôle de guerre…
